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Photo du rédacteurSmarty'z Tech

Mais qui utilise encore un BlackBerry? À part Obama, pas grand monde. Et encore, il est obligé !

Quand Apple sort un nouvel iPhone, le monde s’arrête pour laisser Tim Cook faire sa présentation, diaporama à l’appui. A chaque fois que Samsung lance un nouveau Galaxy, il est précédé par des semaines de fuites et de rumeurs en tous genres. Et quand BlackBerry annonce le lancement d’un nouveau téléphone? L’univers lâche un bâillement poli.

Passion clavier

Normal. En 2009, selon au moins une étude, BlackBerry se targuait de dominer plus de 40% du marché des smartphones. Fin 2014, sa part du gâteau s’était ratatinée à 1,8%. Personne n’y fait plus attention parce que personne n’utilise de BlackBerry. Depuis le lancement de l’iPhone en 2007, les clients s’orientent de plus en plus vers des téléphones pourvus de grands écrans tactiles.


J’ai donc trouvé très touchant que BlackBerry lance un tout nouveau modèle appelé le «Classic» (aujourd’hui disponible déverrouillé pour 429 euros, moins avec un abonnement). Ces dernières années, BlackBerry flirte avec des designs imitant l’iPhone, comme dans le cas du Z30, mais le Classic nous ramène aux téléphones BlackBerry d’antan –avec un vrai clavier AZERTY physique et un look solide et bien démodé. Il évoque ces folles années de jeunesse, lorsque des légions de clients fidèles parlaient de leurs appareils en les appelant des «CrackBerrys». A présent que les meilleures années de l’entreprise sont apparemment derrière elle, rien de surprenant si BlackBerry rêve de revenir à des temps plus heureux.


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Je me suis interrogé sur l’autre terme de l’équation. A qui est destiné ce téléphone? Existe-t-il vraiment des inconditionnels qui se languissent de l’arrivée d’un BlackBerry rétro? Abriterions-nous en notre sein un groupement de féroces revancards du BlackBerry?


BlackBerry vise les «membres éminents d'une profession libérale en pleine maturité». Une autre façon de dire vieux?


Lorsque j’ai interrogé Donny Halliwell, chef de produit marketing senior chez BlackBerry, sur le client cible de ce téléphone, il m’a décrit un «conservateur technophile» et un «membre éminent d’une profession libérale en pleine maturité, bien avancé dans sa carrière».


En lisant entre les lignes j’ai eu la sensation qu’Halliwell évitait soigneusement de prononcer un mot bien particulier: «vieux».


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Nous ne sommes plus en 2009

Nous pourrions en déduire que le genre de client dont il parle, à l’instar de l’entreprise elle-même, adorerait revivre les jours glorieux du milieu des années 2000 –cette fleur de l’âge, cette époque où il nous restait encore des cheveux et où l’on n’était pas obligé d’apprendre à se servir d’un écran tactile.


Halliwell souligne que les gens qui travaillent «pour le gouvernement, dans le secteur financier et dans d’autres domaines réglementés» constituent un pan important de la clientèle de BlackBerry. Donc par ces «membres éminents d’une profession libérale en pleine maturité» nous entendons des cadres de Wall Street, des avocats et des hauts responsables du gouvernement.


S’il y a quoi que ce soit de «cool» dans le BlackBerry aujourd’hui, c’est qu’il compte parmi ses utilisateurs des gens comme Barack Obama, Hillary Clinton, David Cameron et, le plus cool de tous, Frank Underwood.


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Compte tenu de cette impressionnante liste de clients –hey, regardez, même Eric Schmidt y figure– je n’ai pu m’empêcher de m’interroger: utiliser un BlackBerry Classic me donnerait-il l’impression d’être (encore plus) mûr et éminent? Est-ce que mes tempes vont se mettre à grisonner dès l’instant où je tiendrai l’appareil entre mes mains? Est-ce que des derbys vont me pousser aux pieds et des boutons de manchette aux poignets?

Hélas non. Rien de tout cela ne s’est produit. Et je n’ai pas non plus brusquement «bien avancé dans ma carrière», quoi que cela puisse vouloir dire d’ailleurs, pourtant ce n’est pas faute d’avoir prié pour que ça arrive.


A la place, au cours des semaines durant lesquelles j’ai joué avec le Classic, ce qui s’est principalement passé c’est que j’ai compris pourquoi seul 1,8% des utilisateurs de smartphones choisissaient BlackBerry.


Faisons une petite pause, le temps de vous poser quelques questions: aimez-vous les écrans tactiles lisses et réactifs? Les menus intuitifs? Appréciez-vous de prendre des photos précises et de regarder de grandes images bien nettes?

Si la réponse à toutes ces questions est oui, je peux vous garantir que vous ne voulez pas d’un BlackBerry Classic.


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L'ami des entreprises

Ce n’est tout simplement pas le téléphone qu’il vous faut si vous voulez passer d’une appli cool à l’autre, jouer à des jeux idiots ou prendre des photos sympas. L’écran du Classic est minuscule comparé à la nouvelle génération de smartphones –ce qui signifie par exemple que vous ne pouvez voir que quelques tweets à la fois plutôt qu’un long historique, et que les jeux se retrouvent coincés dans un microscopique bout d’écran.


L’appareil photo est médiocre –la différence de qualité d’image entre ce téléphone et un iPhone saute aux yeux de quiconque en est pourvu. Les applis n’ont pas l’air aussi jolies et ne fonctionnent pas aussi bien. Et encore, quand vous arrivez à les trouver.

Instagram, par exemple, n’est pas disponible sur BlackBerry. Certes, il existe des applis «clientes» qui réussissent à reproduire les originales. Halliwell souligne qu’en se «baladant sur Google» on peut généralement trouver une «solution de rechange» pour la plupart des applis manquantes. Mais je n’ai pas envie de me balader sur Google. Et je ne veux pas de solution de rechange. Je veux Instagram. Et je veux l’utiliser avec un appareil photo correct.


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Bien entendu, vous vous doutiez sûrement déjà de tout cela. Les gens n’utilisent pas des BlackBerry démodés pour le plaisir. Ils les utilisent pour le boulot. Pour passer des appels téléphoniques, ou envoyer des textos et des mails.

Si vous avez un mail à écrire et que vous devez taper super vite, il vous faut ce clavier

Kim Kardashian


J’ai conduit un sondage parmi mes amis pour savoir s’il y avait parmi eux des utilisateurs de BlackBerry. Les deux seuls qui m’ont confié en utiliser un par choix étaient des agents immobiliers. Et l’un avait convaincu l’autre de l’utilité de l’objet. Ces gars ont souvent besoin de taper des mails longs, précis et détaillés, debout à un coin de rue de Manhattan. Pour ce genre de tâches, ils préfèrent le clavier physique du BlackBerry.

Or, ils sont loin d’être les seuls à adorer ce clavier. Sommité s’il en est, Kim Kardashian West elle-même s’est épanchée: «Si vous avez un mail à écrire et que vous devez taper super vite, il vous faut ce clavier.» Etonnamment, c’est l’une des rares choses qu’elle ait jamais dites sans avoir été payée pour.


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Autre célébrité, Ryan Seacrest l’aime tant lui aussi qu’il a aidé à promouvoir le Typo2 –un clavier imitant celui du BlackBerry, à greffer sur un iPhone. L’idée est de marier l’écran tactile magique d’Apple et le clavier cliquetant de BlackBerry. C’est une tentative louable, mais lorsque j’ai essayé le Typo2 sur un iPhone 5s, j’ai trouvé que ses touches étaient trop petites et pas assez espacées.


Et puis, cette prothèse de clavier augmente le volume de l’iPhone dans votre poche, le déséquilibre dans votre main et recouvre la touche d’accueil –ce qui signifie que vous ne pouvez pas utiliser votre empreinte digitale avec le système Touch ID pour déverrouiller votre téléphone ou approuver des achats d’applis (il vaut quand même la peine d’essayer le Typo2 si vous ne pouvez pas vous passer de votre iPhone mais que vous mourez d’envie de vivre cette sensation du BlackBerry. La copie est tellement bien faite que BlackBerry a lancé une action en justice pour contrefaçon de brevet).


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Sa plateforme est sûre

Je compatis avec Ryan Seacrest. Je veux dire par là que je comprends le fétichisme à l’égard des claviers physiques. Lorsque Michael Jackson est mort en 2009, j’ai rapidement rédigé un article pour Slate.com, intégralement sur un BlackBerry d’emprunt –dans les gradins, après deux bières, devant un match de baseball des Orioles– et j’ai découvert que sur ce clavier, mes doigts étaient capables d’aller à la même vitesse que mes pensées.


Mais ça, c’était en 2009. Depuis, les écrans tactiles ont fait du chemin. L’iPhone 6 Plus que j’utilise ces derniers temps dispose d’un grand clavier tactile aux touches agréablement espacées, même quand on tient le téléphone à la verticale (en fait il est trop gros pour être utilisé d’une seule main, mais cela pourra faire l’objet d’un autre article sur le gadget).


Mes pouces filent avec facilité sur l’écran du 6 Plus, et les occasionnelles coquilles provoquées par un trop gros doigt ne sont pas un problème grâce au logiciel de correction automatique d’Apple qui s’améliore à grande vitesse.

En bonus: j’aime bien ne pas avoir à enfoncer des trucs. C’est beaucoup plus agréable pour les articulations de mes pouces de tapoter tout en douceur. Ce n’est pas un hasard s’il existe un genre de tendinite appelé «pouce BlackBerry». Oh, et ces insupportables cliquetis sonores! Je préfère de loin le quasi-silence d’un écran tactile. Je n’ai nul besoin de touches bruyantes qui vont me rappeler les anciennes machines à écrire à la IBM Selectric.


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BlackBerry est une sorte d'épouse acariâtre et mal fagotée, mais qui ne vous fait courir aucun risque, l'autre smartphone est votre maîtresse.


BlackBerry n’en possède pas moins un avantage clair sur ses concurrents: c’est le téléphone de prédilection de tous les services informatiques –surtout au sein du gouvernement et dans les secteurs réglementés évoqués par Halliwell.


Pourquoi? Parce que sa plateforme est sûre. S’aventurer dans le pourquoi du comment nécessiterait un traité sur la nature du micronoyau QNX Neutrino, et ni vous ni moi ne méritons cela. Mais il faut reconnaître que BlackBerry travaille main dans la main avec les services informatiques depuis longtemps, ce qui a créé un environnement protégé permettant aux organisations de contrôler les caractéristiques et l’utilisation de leur armada de téléphones portables d’entreprise.


En fait, BlackBerry a même récemment essayé d’exploiter au maximum son savoir-faire en termes de sécurité en fusionnant les options de combiné iOS et Android avec le réseau de logiciel présumé plus sûr de BlackBerry.


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La grande majorité des gens que je connais qui utilisent encore des BlackBerry le font parce que le service informatique de leur entreprise les y oblige. C’est également le cas de Barack Obama. Le président américain a dit qu’il «n’était pas autorisé, pour des raisons de sécurité, à posséder un iPhone» –mais il a été repéré récemment en train de couver des yeux avec une convoitise suspecte l'iPhone 6 de l'ambassadeur du Bahreïn.

Désolé, monsieur le président.


Pas touche pour l’instant. Je me demande si Obama aurait envie faire comme mes amis qui ont un BlackBerry pour le travail: ils possèdent un autre téléphone, à côté, qu’ils traitent comme un genre de maîtresse alors qu’ils considèrent leur BlackBerry plutôt comme une épouse. Une épouse acariâtre et mal fagotée, qui ne leur fait courir aucun risque.



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